Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

La Révolte Chapitre 7

Publié le par Christophe

VII

 

  Je n'avais pas revu ma secrète apparition depuis cette fameuse nuit, mais je ne cessais de songer à elle. Qui était-elle? Que voulait-elle me faire comprendre? Contre quel danger voulait-elle me mettre en garde? Pourquoi avait-elle disparu ainsi? Et pourquoi m'avait-elle choisi, moi? Je ne pouvais répondre à toutes ces questions. Un brouillard impénétrable enveloppait mon esprit chaque fois que j'essayais de faire la lumière sur les évènements de cette nuit-là. Mais il était certain, évident, évident et inconcevable aussi que je devais agir, et agir au plus vite.
  Mon coeur, à défaut de mon cerveau, envoyait des appels, des messages cryptés que je n'arrivais pas à décoder. Mon ventre, mes bras, mes jambes, mon anatomie entière me poussait, me tiraillait, m'exhortait à exécuter une tâche, une mission qui m'était destinée, et à laquelle je ne pouvais me soustraire. Et plus mon corps m'interpellait, plus je sentais au fond de moi que je devais faire quelque chose.
  C'était comme une contradiction insignifiante aux confins de ma poitrine, si lointaine en moi que je ne savais si c'était une douleur physique ou la manifestation d'une quelconque expression de bien-être. Un minuscule point lumineux tout au bout d'un long tunnel obscur, et que j'apercevais à peine. Tout d'abord on doute de son existence, on plisse les yeux et on fixe intensément ce point pour s'assurer qu'on ne rêve pas, puis à mesure qu'on avance vers lui, il devient plus précis, plus clair, et on ressent par je ne sais quelle alchimie étrange qu'on touche au but, que la solution est proche, que la vérité nous pénètre peu à peu, et qu'on accède enfin à la conscience des choses.
  Plus les jours passaient et plus mon point de lumière irradiait. Je commençais lentement à entr'apercevoir ce que cette jeune femme avait voulu me montrer, ce contre quoi elle avait voulu me mettre en garde et à quoi je devais m'opposer. Mais je ne savais que faire, ni comment m'y prendre.
  Et puis il y avait son image, la chaleur de sa main dans la mienne, son regard. Je ne pouvais les oublier. Elle ne m'avait pas encore quitté, et je n'aurais voulu pour rien au monde qu'il en fût autrement.
  Quelques temps après notre rencontre, je remarquai un certain changement dans mon comportement. Je mangeais moins, je ne dormais presque plus, et pourtant il me semblait que mes forces et mon courage avaient décuplé. Le travail à l'Usine ne me faisait plus peur, j'étais même presque heureux de retourner là-bas chaque jour. Pendant les heures interminables que durait ma peine, je retrouvais son visage, sa personne, elle, si petite et si vulnérable, perdue dans le froid et les feuilles de cette nuit d'automne, et tellement belle aussi. Fragile et silencieuse, et pourtant si déterminée.
  Malgré l'épuisement qui m'écrasait, malgré la sueur qui me brûlait le visage, la poussière qui m'étouffait, la puanteur de ma peau, malgré la chaleur épouvantable et le bruit fracassant de la tour, j'espérais la revoir assise sur ce banc, seule à m'attendre en silence. Son souvenir m'aidait à rester debout, et l'espoir d'être de nouveau à ses côtés, ne serait-ce qu'un seul instant, me rendait à la vie.
  Depuis elle, tous les matins, je renaissais des cendres métalliques du démon cruel qu'on me forçait à adorer. Moi, pauvre échéance sans avenir, condamné à la pire des existences, j'avais maintenant une raison de lutter.
  Encore une fois elle s'avancerait vers moi, encore une fois elle me prendrait la main, encore une fois elle plongerait son regard si noir, si mystérieux, si beau dans le mien.
  Encore une fois je frémissais de ces sensations nouvelles qui submergeaient sans cesse ma mémoire.
  Encore une fois je la désirais.

Commenter cet article
S
hello c'est toujours aussi beau et je ne me lasse pas de le lire t'as vraiment du génie la dedans gros bisous j'espere que tu vas bien  je te fais de gros bisous a bientot <br />  sandrine
Répondre